Arte: La perfection de touche d'André Masson au Musée de la Poste

Le Bestiaire d'André Masson: "Insectes dans un champ de blé", 1934, huile sur toile.


Les Perdrix dans la brume: cette oblongue toile (128 × 65 cm) date de 1951. Au milieu des cent cinquante pièces du "Bestiaire d'André Masson" - le moins surréaliste des peintres du premier surréalisme (1896-1987) -, au milieu de cette célébration bien accrochée, parfaitement scandée, cette empreinte de perdrix tranche. Elle tranche à l'envers. Elle tranche par sa douceur, par sa tendresse, son fondu, le lié de l'huile qui éponge les formes plus que reconnaissables - mais pas du premier coup d'oeil, comme dans la brume ou les bruyères.

Rarement peintre occidental s'est approché à ce point de la facture orientale sans mimétisme. Avec une perfection de touche qui permet de saisir l'Etude de pigeons (1952) ou, à l'opposé, cette espèce de graphe qui ne dit plus l'empreinte mais la vitesse, la trajectoire, le glissement des plumes : Perdrix en vol (1952).

Huile, fusain, pastel, sable, encres, Chine, aquarelle, gouache, papier marouflé, poissons, minotaures, insectes subtils, toros, chevaux, chimères, bestioles comiques, drames des sous-bois, tout y passe.

Tout y passe, dans une énergie débordante dont l'exposition rend parfaitement la couleur et la joie. L'amour du vivant. Ce n'est pas que la mort et la cruauté soient évincées, loin de là - les animaux ne sont pas tous des peluches -, mais elles participent de l'approbation de la vie jusqu'au bout. Curiosité à ne pas rater : la voix gourmande de Masson (entretiens avec Georges Charbonnier), et le film de Jean Grémillon, surprenant auteur de sa propre musique (André Masson et les quatre éléments, 1957): on voit le peintre en action, ses sables, ses taches, son "dripping", sa puissance de vie.

Le Bestiaire d'André Masson, dans le cadre de la programmation "Un timbre - un artiste" du Musée de la Poste, 34, boulevard de Vaugirard, Paris-15e. du lundi au samedi, de 10 heures à 18 heures. 5€ et 6,50€. Jusqu'au 5 septembre.

Francis Marmande

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