Debate: L'État prêt à céder des monuments nationaux

Grâce à l'article 52 du projet de loi de finances, la région Centre et le département d'Indre-et-Loire, par exemple, pourraient devenir propriétairesdu château d'Azay-le-Rideau. Crédits photo: Le Figaro Magazine
 

Les sénateurs ont réclamé, vendredi, des précisions sur l'article de loi autorisant les collectivités territoriales à se porter acquéreurs. «Une grande braderie» pour certains.

 
Claire Bommelaer
 
 
 
 
 

L'idée peut paraître séduisante aux yeux d'un gestionnaire rigoureux, mais elle provoque un tollé au sein des amoureux du patrimoine. Niché dans le projet de loi de finances, actuellement en discussion au Sénat, un petit article (le 52) ouvre la possibilité pour les collectivités territoriales de devenir propriétaire d'un monument national.

Châteaux, parcs, dolmens, musées, monuments, mais aussi palais pourraient, en théorie, quitter le giron de l'État si une ville ou une région le demande. Et ce, sans grand contrôle sur leur devenir. L'État possède une centaine de monuments nationaux, comme le Mont-Saint-Michel ou l'Arc de triomphe. S'y ajoutent des établissements comme le Louvre, des palais comme l'Élysée, des parcs, des châteaux comme Fontainebleau, et des « raretés » liées à l'histoire, comme l'obélisque de la Concorde. Tout cela coûte cher, bien sûr, et coûtera de plus en plus cher à l'entretien. D'où l'idée de s'en débarrasser - le terme, bien sûr, est récusé par le gouvernement - au profit de communes ou de régions, soucieuses d'étoffer leur offre touristique.

Un système de transfert existait déjà, avec un certain nombre de garde-fous. En 2007 et 2008, 70 monuments, dont le château du Haut-Koenigsbourg et celui de Chaumont-sur-Loire, ou la maison du maréchal Foch à Tarbes, ont été transférés. Mais les collectivités pouvaient choisir parmi une liste fermée de monuments.

 

«Une affaire très sensible»

Le projet de loi, lui, ne présente presque plus aucune contrainte. Ainsi, la liste des monuments dit inaliénables, comme ceux liés à l'histoire militaire de la France, n'existe plus. Et c'est le préfet qui sera garant du bien-fondé de ce que certains appellent une «grande braderie». «L'État pourra tout de même refuser un transfert pour des raisons symboliques ou financières», tempère-t-on à Matignon. L'Élysée, les Invalides, le Mont-Saint-Michel, les grandes cathédrales, le domaine de Carnac, le château de Fontainebleau ou toutes les anciennes demeures royales, dont Versailles, ne devraient donc pas changer de mains.

Les députés ont déjà amendé le projet gouvernemental en réclamant un contrôle du ministère de la Culture. Vendredi, les sénateurs ont réclamé, et obtenu des précisions sur le devenir des monuments, en cas de problèmes financiers. Que se passerait-il, en effet, si les finances locales venaient à se tarir ? Après discussions, le gouvernement a accepté, vendredi, de poser le principe de l'inaliénabilité des monuments : une collectivité ne pourra jamais revendre le monument à un privé. Le combat des parlementaires contre l'article 52 ne semble toutefois pas féroce. Tous sont des élus locaux et pourraient à ce titre être intéressés par la reprise d'un monument dans leur fief électoral. Le conseil général des Hauts-de-Seine n'a jamais caché, par exemple, qu'il était intéressé par le parc de Saint-Cloud.

«L'affaire est trop sensible pour qu'on en reste là» juge Jean-Jacques Aillagon, patron de Versailles. Et de marteler : «Le président ne peut à la fois promouvoir un projet de Musée de l'histoire de France et considérer que ces lieux de la mémoire nationale puissent échapper à la responsabilité de l'État».

 

 

 

 

 

http://www.lefigaro.fr/culture/2009/11/28/03004-20091128ARTFIG00217-l-etat-pret-a-ceder-des-monuments-nationaux-.php

 

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